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We The Revolution, ça rime avec déception – TEST



Le contexte social est tendu : les français sont nombreux à descendre dans la rue. Ils battent le pavé, car ils en ont marre que leur dirigeant ne fasse des cadeaux qu’à sa cour et aux plus riches de ses amis. Marre, aussi, d’être abusés par leurs patrons, qui s’en mettent plein les poches pendant qu’eux triment et ont de plus en plus de mal à finir les fins de mois. Tout ceci doit cesser, et au plus vite ! La richesse doit être mieux distribuée et l’égalité remise au centre du modèle de notre beau pays. Non, je ne parle pas là de la crise des gilets jaunes, mais de la Révolution Française, probablement la date que vous avez la mieux retenue de vos cours d’histoire, et thème de We The Revolution (en fait We. The Revolution s’il faut être précis, mais on va simplifier parce que des points partout, ça n’est pas très joli), le titre qui nous intéresse aujourd’hui.

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Austère comme Fred

« La première impression est la plus forte », nous disait Eugène Delacroix, peintre de La Liberté guidant le peuple, tableau illustrant les Trois Glorieuses mais utilisé depuis comme symbole de la Révolution Française. Et la première impression donnée par le titre de Polyslash n’est clairement pas à son avantage. On lance à peine le jeu que déjà notre manette n’est plus détectée et qu’il faut appuyer sur L et R pour pouvoir continuer. Un temps de chargement un peu longuet plus tard, on arrive devant un menu en anglais : il faut aller dans les options pour changer la langue du jeu, chose que je n’avais plus fait sur console depuis 2008. Alors l’envie de lancer We The Revolution, à ce moment-là, elle est déjà un peu passée, vous voyez. Mais je reste un éternel optimiste et j’appuie sur « commencer ». Parlons déjà du plus évident : oui, le jeu est très joli. Ses graphismes 2D tout en polygones sont forts esthétiques, siéent très bien à l’ambiance macabre de l’époque qu’il dépeint et ne deviennent jamais un gimmick facile, contrairement à ce que je craignais. C’est sobre, à la limite du roman graphique, un très bon point. Par contre, ce que l’on remarque tout aussi immédiatement, c’est que l’on ne pige rien à la narration. Je conçois que ça soit un parti pris, mais il est à mon sens raté. Même plus tard, quand on commence à avoir envie de connaître la suite de l’histoire – à défaut de s’attacher aux personnages, il nous manque du contexte sur ceux-ci et leurs relations pour tout comprendre : pourquoi ma femme me déteste dès le début, par exemple ? Je n’aurais jamais de vraie réponse à ça dans le jeu ; on me dit « tu es un alcoolique et un joueur » alors que je rentre chez moi chaque soir pour passer du temps avec ma famille. Je ne comprends pas.

Mais passons sur la narration – pour l’instant, puisque We The Revolution vous jette immédiatement dans le bain du gameplay par une scène de tribunal où vous apprenez les bases de ce qui constitue le cœur du jeu, soit les procès. Et là, on retrouve immédiatement un défaut qui va poursuivre le titre tout du long : à chaque fois qu’un nouvel élément de jeu sera introduit, il sera vite et mal expliqué et vous allez devoir tâtonner par la suite pour comprendre vraiment ses subtilités. Explique-moi ou ne m’explique pas, jeu, mais choisis ! Et le pire, c’est que des mécaniques de gameplay, il en introduit sans cesse. On passe donc une bonne partie de notre temps à faire des choses sans savoir pourquoi ni comment et à se faire sanctionner à chaque erreur due au tâtonnement : c’est austère et triste comme une porte de prison, et ça pousse par moment à la démoralisation.

Qu’on leur coupe la tête !

Dommage, parce que We The Revolution a très clairement quelque chose à raconter, et c’est ce qui, dans mes moments de désespoir les plus intenses, m’a poussé à continuer – ça, et le très gros chèque que m’a donné l’éditeur pour que je mette un 80% en bas de cette page. Vous incarnez Alexis Fidèle, un juge plutôt banal dont la Révolution va un peu profiter mais dont il va aussi se servir pour gagner en pouvoir. Je ne vous dévoilerai pas grand-chose du scénario, car il est rempli de petits et gros retournements de situation, mais il est plaisant de voir que l’équipe de développement semble avoir étudié avec attention cette période de l’Histoire française : on retrouve plein de personnages plus ou moins connus et l’on est vraiment impliqué dans les intrigues politiques de l’époque, avec, parfois, la possibilité de dévier un peu de l’Histoire, à défaut d’en changer le cours. Et, c’est quelque part, la leçon que veut vous donner le titre, avec toute la frustration qui va en découler : vous pouvez essayer de changer les choses, mais in fine, il y aura toujours plus fort que vous pour décider à votre place. En l’occurrence, cela se traduit par une éternelle manipulation du jeu à votre égard ; si, au début, vous essayez tant bien que mal de démêler le vrai du faux et de juger équitablement les accusés à la manière de ce que vous pouvez faire dans un Phoenix Wright, vous allez être très vite confronté au système de factions, chacune attendant de vous un jugement qui lui est propre et avec lesquelles il va falloir jongler pour ne pas perdre la vie, ce qui fait que, vous n’allez rapidement plus juger en fonction du crime commis mais décider à l’avance du sort que vous allez réserver à l’accusé et orienter les questions pour que le jury applique la sentence que vous souhaitez.

We The Revolution pousse même la perversité jusqu’à vous envoyer des criminels immondes ou, inversement, des gens absolument innocents, que vous allez devoir respectivement libérer ou condamner à mort quand le respect que vous porte une faction atteint son niveau le plus bas : par exemple, quand les aristocrates étaient à deux doigts d’en finir avec moi, j’ai été confronté à un proxénète d’enfants que j’ai été obligé de libérer afin de ne pas perdre la vie. De fait, même si cela fonctionne parfaitement en termes de narration et de dénonciation des dérives de la Révolution, ainsi que pour nous faire ressentir la descente aux enfers de notre personnage, je trouve le procédé à la limite de la malhonnêteté, puisque l’on n’est jamais libre (emprisonner les gens à la suite de procès devient par ailleurs rapidement tout bonnement impossible), et que l’on est même parfois obligé de recommencer plusieurs jours en arrière pour rattraper une « erreur » qui était impossible à prévoir : je crois n’avoir jamais autant ragé sur un jeu aussi calme.

Le vrai problème de We The Revolution

Je ne peux cependant pas trop blâmer un jeu pour un choix de narration que je trouve plus manipulateur que raté. Ce pourquoi je peux le blâmer, en revanche, c’est pour ce portage à la va-vite qu’il nous offre. Je conçois que ce soit un jeu PC avant tout : de par sa lenteur, son manque de directives, son côté très « jeu de plateau », le titre le respire par toutes ses pores. Mais, dès lors, pourquoi vouloir porter sur console quelque chose qui ne s’y prête pas du tout ? Je vous ai déjà parlé du fait qu’il faille changer la langue du jeu dans les options, un reliquat évident de son support d’origine, mais finalement pas bien grave comparé au vrai souci auquel j’ai été confronté durant toute ma partie : comme vous avez pu le constater avec les captures d’écran postées dans ce test, les textes sont ridiculement minuscules, jusqu’à l’illisible parfois. C’est simple : à moins d’avoir une immense TV 4K, We The Revolution est tout bonnement injouable en docké, et c’est inadmissible (et encore, nous avons la chance de pouvoir en profiter en portable, contrairement aux possesseurs de PlayStation 4 et d’Xbox One, deux supports sur lesquels le jeu sort aussi ce 25 juin). J’ai l’impression d’avoir perdu 2 points à chaque œil en ayant passé une quinzaine d’heures sur ce test.

Et ce n’est pas le seul souci auquel j’ai été confronté : textes qui se chevauchent, mixage sonore immonde (les cinématiques sont fortes alors qu’il faut pousser le son à fond pour entendre les bruits d’ambiance lors des procès), les contrôles parfois hasardeux du fait du manque de repères visuels… J’entends bien qu’il s’agisse d’une version test, mais je ne sais pas comment tout ça sera solutionné d’ici au jour de la sortie – certains problèmes me semblent d’ailleurs inréglables à moins d’une grosse refonte de l’interface. Et vous voulez connaître le clou de l’histoire ? C’est qu’après avoir fait tant d’efforts pour le comprendre et m’investir dans l’histoire, mon jeu crash systématiquement après le sixième jour du troisième acte, m’empêchant tout bonnement de le terminer, et ce peu importe mon approche de cette journée fatidique (et, croyez-moi, j’ai passé des heures à essayer). Cela sera probablement réglé d’ici la sortie, mais en attendant, du début à la fin, We The Revolution m’a bien frustré. Quel gâchis.

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Terriblement rageant, car il y a un gros potentiel
  • Terriblement rageant, car il y a un gros potentiel - 40%
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Résumé

Pas très accueillant ni très bienveillant, We The Revolution a tout de même de belles qualités à faire valoir, en premier lieu desquelles sa superbe direction artistique, mais aussi son respect de l’Histoire et sa volonté de faire passer sa narration et ses émotions avant tout par le jeu : dommage qu’il lui faille parfois manipuler le joueur pour arriver à ses fins. Si vous êtes prêts à surmonter ses défauts et que vous êtes autant un fan d’Histoire que d’histoires, vous trouverez peut-être du bon dans le titre de Polyslash. Néanmoins, la qualité très médiocre du portage me le rend impossible à conseiller, et ce, même si certains soucis seront probablement patchés d’ici à sa sortie – et tant pis pour le gros chèque.

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giomosby
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Fan de consoles Nintendo et de jeux japonais depuis que je suis en âge de tenir une manette. Si je ne suis pas dispo, c'est probablement que je visite un parc Disney.