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Deadly Premonition 2: A Blessing in Disguise, une vaste plaisanterie – TEST

On dit qu’il est parfois nécessaire de regarder de mauvais films pour pouvoir apprécier les chefs-d’oeuvre à leur juste valeur. En est-il de même pour les jeux vidéo ? Difficile de répondre précisément, déjà que je ne suis pas nécessairement convaincu par cette idée en ce qui concerne le cinéma. En revanche, je peux affirmer sans aucun doute qu’après l’horrible expérience à laquelle je me suis soumis, je savourerai infiniment plus les jeux que l’on peut qualifier de “bons mais sans plus” à l’avenir. Aujourd’hui, je vous livre mon test de Deadly Premonition 2: A Blessing in Disguise qui me laisse encore pantois, mais pas forcément dans le bon sens du terme.

Rencontre avec Morgan

Commençons par un petit rappel du scénario du jeu. Suite directe du premier épisode paru en 2010, Deadly Premonition 2 nous replace dans la peau de l’agent spécial Francis York Morgan (mais appelez-le York, comme tout le monde le fait selon lui), enquêtant dans la ville de Le Carré en Louisiane pour le compte du FBI. En 2005 au moment des faits, la petite ville, probablement inspirée du French Quarter de la Nouvelle-Orléans, voit sa tranquillité terriblement perturbée par la mort d’une jeune fille dont le cadavre a été méthodiquement dépecé avant d’être placé bien en évidence sur un sinistre autel, comme pour réaliser un épouvantable rituel. Une terrible investigation commence alors pour découvrir la vérité derrière cet acte macabre et l’agent York semble tout à fait enchanté à l’idée d’y prendre part ! A noter que l’enquête sera abordée de deux points de vue tout à fait distincts : celui de York lors de son enquête en 2005, mais également celui d’Aalayah Davis en 2018. Également agent spécial pour le FBI, la jeune femme ne semble nullement convaincue par les conclusions de l’affaire Le Carré rendues à l’époque et entend bien faire la lumière à ce sujet.

Dans les faits, le plot de Deadly Premonition 2 avait absolument tout pour plaire : je dévore régulièrement des polars et autre thrillers et j’ai eu le sentiment de retrouver des éléments de mes oeuvres préférées dans ce jeu, ce qui fut le cas dans une certaine mesure. Les personnages de l’intrigue sont excellents, tous animés d’une excentricité savoureuse qui les rend si peu conventionnels et un peu barjo sur les bords. Un aspect déjanté qui se reflète principalement chez York qui choisit de se fier à un oracle vaudou que lui seul semble être en mesure de voir et qui converse régulièrement avec un certain Zach, un être avec qui il semble entretenir une relation aussi étroite qu’étrange, surtout dans la mesure où il semble résider dans son esprit. Tout semble n’être qu’émerveillement pour l’agent dont chaque aspect de Le Carré l’enchante et lui font apprécier d’y avoir mis les pieds. Les personnages secondaires ne sont pas non plus en reste : la jeune mais diablement rusée Patricia est une équipière de choc, bien qu’elle semble la seule à avoir les pieds sur terre au milieu de cette bande d’adultes dont les représentants sont soit fous, soit idiots, quand ils ne cumulent pas les deux. La famille Clarkson et ses membres qui règnent sur Le Carré d’une main de fer dans un gant d’acier offrent également une belle brochette de psychopathes avec un penchant pour les alligators voraces (les dogues allemands c’est surfait comprenez-vous ?). Cette image de clan tout puissant n’est pas sans rappeler la terrifiante famille Lex dans Peur Noire de Harlan Coben où le héros se heurte à de semblables individus, ce qui me plaisait beaucoup.

A la recherche du framerate

Bref, tout ceci promettait une intrigue soignée et tout à fait haletante. Promesse tenue sur cet aspect : l’enquête menée par York est passionnante et bien menée, aussi bien par ses rebondissements et ses personnages, et aurait sûrement fait un excellent roman ou film policier. Mais nous sommes dans le cadre d’un jeu vidéo ici qui ne saurait donc se limiter à son scénario, aussi bon soit-il, pour se faire valoir et justifier son achat. Sauf qu’il semble que Toybox, le studio derrière le titre, n’ait pas eu la même vision des choses. Deadly Premonition 2 est affligé de défauts si énormes que je suis estomaqué de me dire qu’il a pu être commercialisé dans un tel état et vraisemblablement en toute confiance.

For the record comme on dit de l’autre côté de la Manche, je n’ai pas joué au premier Deadly et je ne m’y étais pas intéressé particulièrement, au point de ne voir que des illustrations promotionnelles et donc aucun visuel in game. Aussi, ma surprise fut démesurée quand j’ai appris d’une part, que le jeu était considéré comme un titre culte par une frange de fans et quand j’ai lancé pour la première fois Deadly Premonition 2 d’autres parts. De ce que j’ai cru comprendre, son prédécesseur avait déjà été critiqué par de nombreux problèmes techniques mais qui, paradoxalement, avaient fini par faire partie de son attrait, comme on peut parfois succomber au charme de quelqu’un qui de prime abord n’avait rien pour nous séduire. Je ne suis pas spécialement regardant sur les graphismes : de nombreux jeux Nintendo sont loins d’être parfaits techniquement, mais ils ont cette capacité rare à faire oublier l’absence des sacro-saints 4K/60 FPS (qui ne sont d’ailleurs pas plus présents chez la concurrence visiblement) grâce, entre autres, à un gameplay maîtrisé et accrocheur.

Aussi, quand j’ai vu les visuels de Deadly Premonition 2, j’ai tenté de passer par-dessus le fou rire qui m’a pris. Car, soyons honnête, ce jeu est repoussant visuellement. Les couleurs délavées, les modèles 3D d’une qualité douteuse, les textures infâmes… tout ceci semble sorti d’un jeu datant de la GameCube et encore. Les animations sont particulièrement amusantes dans leur médiocrité : les personnages ne marchent pas, ils glissent comme si les rues de Le Carré étaient enduites de savon. Ou peut-être sont-ils tous propriétaires d’une de ces paires de chaussures à roulettes que beaucoup de petits portent de nos jours, ce qui tendrait à montrer que Le Carré est décidément bien en avance sur son temps (le jeu se déroulant en 2005 pour rappel). Visiblement tout le budget semble avoir été consacré aux mouvements des lèvres pendant les dialogues, le reste du visage des personnages restant résolument figés. Heureusement que le doublage est de bonne facture car il serait compliqué d’apprécier les conversations et de se sentir impliqué autrement.

Bref, Deadly Premonition 2 a réussi l’exploit de détrôner Wolfenstein: Youngblood que je considérais jusque là comme le plus laid des jeux sur Switch. Visuellement, le jeu est donc hideux. Le framerate n’est pas non plus à la hauteur et offre de splendides saccades au moindre mouvement, que ce soit de la caméra ou du personnage. L’ambition de créer un petit monde ouvert était louable, mais irréaliste au vu du budget alloué. Pourtant, le potentiel était présent : parcourir une ville typique du Sud des Etats-Unis et en découvrir la culture était une idée séduisante, mais cela aurait nécessité un minimum d’attrait artistique.

Gameplay y es-tu ?

Le tableau n’est pas nécessairement plus réjouissant pour le gameplay, puisqu’il est d’une stupéfiante pauvreté. En tant qu’agent du FBI, York dispose d’un pistolet que vous utiliserez pendant les phases de tir d’un intérêt très limité. Quand la nuit tombe sur Le Carré, le ciel se teinte de rouge et les rues sont envahies de monstres revenant infiniment en vagues successives. De fait, sortir après minuit n’est en rien attirant et vous serez d’avantage tentés de vous rendre directement au lieu d’intérêt et d’échapper à vos ennemis sans les affronter. De toute façon, il vous suffira de deux coups pour en venir à bout, un si vous visez la tête. Diverses altérations de statut ont été imaginées pour vous mettre des bâtons dans les roues, mais les objets de soin sont si nombreux qu’elles pourraient aussi bien être absentes. Des combats de Boss sont également de la partie mais leur platitude fait qu’on a plutôt envie de s’en débarrasser le plus vite possible. 

Globalement, Deadly Premonition 2 souffre d’un cruel manque d’intérêt : son histoire a beau être intéressante, difficile de s’y accrocher tant tout le reste du jeu est repoussant. Le titre accorde une grande importance aux horaires pour vos différentes activités : certaines choses ne pourront être faites qu’un lundi, même s’il s’agit d’un évènement majeur du scénario, d’autres uniquement entre 14h et 17h30. Vous vous retrouvez donc régulièrement obligés d’utiliser un objet ou de vous rendre à l’hôtel pour avancer le temps, car inutile de compter sur l’avancée de l’horloge interne du jeu : vous aurez perdu toutes vos dents avant d’atteindre l’horaire désiré. D’autres contraintes s’invitent dans le gameplay avec un système de jauges pour vos points de vie (d’accord), votre endurance (encore d’accord), votre sommeil (why not), votre satiété (moui…) ainsi que votre hygiène (quoi ?!). De fait, il faudra régulièrement ravitailler votre personnage en sommeil et en snack, sans quoi votre endurance sera constamment au minimum. Dans son test du premier épisode, Giomosby (coeur sur toi bg) rapportait qu’Hidetaka Suehiro, alias Swery, misait sur ces petites corvées pour renforcer l’attachement du joueur au personnage de York. Personnellement, j’ai d’avantage été charmé par son charisme et son extravagance que par l’ennui de devoir le faire manger ou lui faire prendre une douche (à la limite, qu’on nous laisse admirer ses abdos !) , sinon j’aurais téléchargé le dernier épisode des Sims. 

Le manque d’intérêt vient également du fait que jamais vous n’aurez le sentiment de mener une véritable enquête policière. Le jeu se contente de vous indiquer des lieux d’intérêt en vous tenant la main tout le long et en s’empressant de vous remettre sur le droit chemin en cas d’erreur de votre part. Certaines phases auraient pu s’apparenter à de la réflexion, avec des QCM et des interprétations d’oracle, mais force est de constater qu’il ne vous faudra que quelques minutes pour en venir à bout. On repassera pour la satisfaction donc.

Pour être honnête, je suis perplexe vis-à-vis de Deadly Premonition 2. Depuis que je l’ai lancé, j’ai l’horrible sentiment d’être insensible à une oeuvre qui a pourtant ses adeptes, au point d’être qualifiée de “culte”. Je ne parviens pas à comprendre comment on peut l’apprécier, ni même comment on peut le considérer comme un jeu vidéo, même en admettant que tout ceci soit fait dans un but parodique. Que son histoire soit prenante, c’est un fait. Mais dans ce cas, n’aurait-il pas été mieux d’en faire un roman, un film ou une série ? Je n’ai strictement aucune expérience en tant que développeur et je n’ai qu’une vague idée du temps et de l’argent que peut demander un projet de jeu vidéo. En revanche, je ne pense pas être trop à la marge en disant que faire de la médiocrité technique une marque de fabrique n’est pas une stratégie des plus sûres : un jeu se doit d’être agréable à jouer, et ce n’est pas le cas ici. Peut-être suis-je dépourvu d’une forme de sensibilité particulière, ce qui fait que je n’ai pas su apprécier Deadly Premonition 2, mais je ne suis pas certain d’en être attristé. Je suis en revanche admiratif du culot de Swery, de ToyBox et de Rising Star Games de commercialiser un jeu dont le prix (50€) contient plus de chiffres que le framerate.

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Une excentricité à double-tranchant
  • Une excentricité à double-tranchant - 40%
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Une excentricité à double-tranchant

Que dire ? Deadly Premonition 2 est une catastrophe sur de nombreux points. Visuels affreux, technique affligeante, gameplay famélique… Seule l’histoire du jeu m’empêche de mettre une note plus basse encore. Prendre ce titre en main est une expérience dont on ne tire que bien peu de plaisir et j’aurais infiniment préféré en découvrir l’intrigue à travers un livre ou un film. Si vous faites partie des inconditionnels du premier épisode, on peut supposer que vous serez charmés par son successeur, bien que je me permette d’exprimer poliment mon incompréhension.

Pros

  • Une enquête passionnante avec un bon rythme
  • Une galerie de personnages attachants avec un héros particulièrement charmant
  • Un bon doublage

Cons

  • Visuellement infâme
  • Framerate à la dérive
  • Des contrôles lourds et grossiers
  • Des combats plats
  • L’implication du joueur limitée au possible
  • Des incohérences
  • Toutes sortes de contraintes inutiles
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LatoJuana
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Gamer de 26 ans avec un penchant pour les jeux racontant de belles histoires. Je suis rédacteur sur le site depuis 2017. Zelda reste ma licence de cœur mais j'aime découvrir des jeux de toutes sortes !

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